Un orang-outang ne fait pas le dénigrement

Un arrêt intéressant de la Cour d’Appel de Paris a été rendu en décembre dernier (CA Paris – Pôle 5 – Chambre 2 – Arrêt du 8 Décembre 2023) dans un litige qui opposait la société Ferrero et la société Rigoni di Asiago.

Cette dernière commercialise en France une pâte à tartiner aux noisettes sous la marque Nocciolata et en fait la publicité sous la forme d’une annonce mettant en scène un enfant dégustant une tartine aux côtés d’un singe, une voix off précisant « Nocciolatta, c’est sans huile de palme ».

Ferrero estimant que cette publicité faisait référence directe à la polémique suscitée par l’utilisation d’huile de palme dans la production de sa pâte à tartiner Nutella et constituait un dénigrement de ce produit, a assigné Rigoni en dénigrement et parasitisme.

Un premier jugement les ayant déboutés, Ferrero a formé appel en tentant de faire un parallèle entre des commentaires d’internautes liant la présence de l’orang-outang et la déforestation qui serait liée à l’huile de palme pour démontrer le caractère dénigrant de ce message publicitaire.

Rigoni a étayé son dossier d’un sondage réalisé auprès de consommateurs et consommatrices, duquel ressortait qu’aucune polémique sur l’huile de palme n’était véhiculée par cette publicité, et que par ailleurs, la société Ferrero n’était pas citée ni désignée dans cette publicité.
En conséquence, les demandes de Ferrero au titre du dénigrement et de la concurrence déloyale ont été une fois encore déboutées.

Le dénigrement en droit français répond aux exigences des règles de responsabilité civile, à savoir un dommage + une faute + un lien de causalité entre les deux. La jurisprudence demande en principe la réunion de trois conditions : des propos publics ; une entreprise ou une marque, un produit identifiables ; et un caractère péjoratif.

Dans le cas présent, Ferrero n’était nullement identifié, de même que sa marque Nutella, et aucun caractère péjoratif ne ressortait du discours.
La société italienne se retrouve éclaboussée par cette décision qui met l’accent sur une certaine sensibilité de l’opérateur sur le sujet de l’huile de palme.